09/12/2011

Quand les journalistes coupent (les psychanalystes)

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A la faveur d'une polémique sur l'autisme et les psychanalystes, le tribunal de Lille se penche sur "le droit de coupure".

C'est une documentaire tournée par Sophie Robert qui se retrouve au centre de cette polémique. Le film, déjà visible sur le net et qui devait être programmé bientôt sur Arte, se penche sur le sort des enfants autistes. Dans la ligne de mire de la réalisatrice, les psychanalystes installés dans les institutions françaises qui, selon elle, bloquent les nouvelles pratiques médicales qui peuvent venir en aide aux enfants autistes et à leurs parents.

En gros, Sophie Robert et la coordination nationale Autistes dans Frontières estiment que l'autisme peut être provoqué par des problèmes médicaux neurologiques et que des méthodes comportementales peuvent adapter les enfants à la vie réelle et les rendre plus heureux. Tandis qu'en face, les psychanalystes (surtout ceux regroupés autour de l'héritage de Jacques Lacan) estiment que c'est la mère qui a étouffé d'amour son enfant et que le père n'a pas voulu (ou pas pu) séparer le bébé de sa mère afin de l'ouvrir au monde extérieur. Des termes, employés parfois par les psychanalystes, comme "mères étouffantes" ou "mères toxiques" n'améliorent pas l'ambiance.

=La phrase qui suit n'est pas correcte car la citation "journalistes hors des tribunaux" signifie en fait: "il ne faut pas s'attaquer aux journalistes". La phrase a existé mais merci de ne pas en tenir compte. Didier Specq: (En face, on sait parfois être un peu sectaires aussi. En témoignait par exemple, hier devant le tribunal, une affichette qui disait: "psychanalystes hors des institutions, journalistes hors des tribunaux").=

Trois psychanalystes de renom demandaient donc, jeudi, le retrait de leurs propos, enregistrés et filmés, du film. Motif: après une interview très longue, on n'avait retenu qu'une ou deux phrases destinées à ridiculiser leur position. Entre nous, avouons-le: c'est parfois le péché mignon des journalistes qui coupent adroitement ce qui a été dit. Entre nous, avouons-le aussi: c'est le droit d'un auteur de retenir la phrase, effectivement prononcée, qui lui semble résumer le mieux le propos général de quelqu'un.

La question juridique peut se résumer ainsi: la phrase prononcée appartient-elle à l'auteur de la phrase qui, comme il en serait toujours propriétaire, peut la retirer s'il le désire ou, à l'inverse, la phrase prononcée appartient-elle dorénavant à l'auteure du film qui en a fait un élément d'une oeuvre cohérente et complète? Vaste question.

La présidente Elisabeth Polle se penchait donc, jeudi dernier, sur cette question devant une nombreuse assistance plus que passionnée. Inutile de dire que, dans la salle d'à côté où les comparutions immédiates se comptaient en mois de prison ferme, on comprenait mal les passions déchaînées qui s'exprimaient à quelques mètres du box où les prévenus comparaissent entre deux policiers.

Les psychanalystes de renom avaient mobilisé un ancien bâtonnier du barreau de Lille, Me Bertrand Debosque, et un futur bâtionnier du barreau de Paris, Me Christian Charrière-Bournazel.

Dans le camp d'en face, on notait la présence de Me Stéfan Squillaci qui plaidait avec sa fougue habituelle et de Me Benoît Titran. Ce dernier avait fourni un intéressant travail. D'abord, les documents écrits et signés où les psychanalystes disaient accepter qu'on utilise leurs propos. Ensuite, une copieuse retranscription de nombreux extraits enregistrés qui tendaient à prouver que les propos, même raccourcis, ne travestissaient en rien l'opinion réelle de ces spécialistes. Pour les amateurs du genre, signalons qu'Esthela Solano-Suarez (Paris), Eric Laurent (Paris) et Alexandre Stevens (Bruxelles) sont les psychanalystes qui se plaignent.

La présidente Elisabeth Polle (qui est devenue célèbre voici quelques années en annulant un mariage parce qu'une jeune fille avait caché à son mari qu'elle n'était plus vierge) rendra son intéressante décision le 26 janvier prochain.

Didier Specq

Commentaires

Vous omettez duex ou 3 détails dans votre article:
- Ce ne sont pas Sophie Robert et ASF qui pensent que l'autisme est un trouble neurologique, mais l'ensemble de la communauté scientifique internationale, depuis 40 ans . La chercheuse Monica Zylbovicius présente ces recherches dans Le Mur d'ailleurs. Seule la pédopsychiatrie frnaçaise biberonnée de psychanalyse de l'université jusqu'au cabinet n'est pas encore informée :-)
- Ce qui est montré dans ce film est ce que la vaste majorité des parents ont entendu et entendent hélas toujours dans le secret des cabinets psychiatriques, des IME. baladez vous un peu sur le web, lisez les témoignages, documentez vous.La France a été condamnée par la Cour Européenne à cause de cela en 2004.
Alors oui, nous guettions ces confidences , nous parenst, depuis longtemps car personne ne nous croyait. Maintenant la Présidente pourra , après avoir vu les rushes , dire son jugement. Rien n'a été travesti ou coupé. C'est la vérité stupide et cruelle , sortant de la bouche m^me de ceux qui croient la détenir.
Le mur se fissure, et nous, familles, allons élargir la brèche, jusqu'à ce qu'il pète et que nos enfants aient accès aux m^me soins que le reste du monde.

Écrit par : STANABA | 09/12/2011

citation :
"En face, on sait parfois être un peu sectaires aussi. En témoignait par exemple, hier devant le tribunal, une affichette qui disait: "psychanalystes hors des institutions, journalistes hors des tribunaux"

En quoi est-ce sectaire ? vous méconnaissez visiblement le problème.
Vous êtes journaliste : j'imagine que vous êtes déjà d'accord avec "les journalistes hors des tribunaux", donc ce que vous qualifiez de sectaire c'est que les parents ne veulent plus de psychanalystes dans des institutions qui reçoivent des enfants HANDICAPES et non PSYCHOTIQUES ?
C'est exactement comme si on essayait de traiter des enfants diabétiques par la psychanalyse (après tout : le lait maternel est sucré. Un enfant qui a un problème avec le sucre, c'est peut-être bien qu'il est trop fusionnel avec sa mère et veut "conserver" le sucre dans son sang comme substitut maternel !!)
Leur discours est exactement de la même eau. Et vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point ces gens sont toxiques, surtout quand leur catéchisme est régurgité à longueur de journée par des pédiatres, infirmiers, psychomotriciens, orthophonistes comme des perroquets inintelligents.
OUI ils doivent sortir des institutions où ils vivent en parasites au mieux en ne faisant rien (voir les aveux explicites dans LE MUR) au pire en pratiquant des "thérapies" barbares (le packing) qui est la honte de la France aux yeux des experts mondiaux.

Écrit par : cardinalle | 09/12/2011

Chère Cardinalle,

Je respecte tout à fait vos opinions. Je vous signale tout de même que certaines personnes respectent aussi la psychanalyse et affirment que l'analyse leur a apporté beaucoup. Mais, surtout, même si on déteste le rôle des psychanalystes dans le traitement de l'autisme, je trouve très étonnant qu'on puisse dire: "journalistes hors des tribunaux". La justice est pour l'essentiel publique que je sache et les journalistes peuvent rendre compte des audiences publiques tenues dans les tribunaux, non?

D.S.

Écrit par : didier specq | 09/12/2011

Ah ? c'est comme cela que vous l'avez compris ? Moi j'ai compris " les journalistes n'ont pas à être traînés devant les tribunaux parce qu'ils font leur travail d'information" c'est à dire Liberté d'écrire et de penser et non à la censure (ce qu'essaient d'obtenir les 3 "victimes").
Quant à la psychanalyse et aux psychanalystes, ils sont parfaitement le droit d'exister d'écrire des choses que eux mêmes doivent avoir du mal à comprendre parfois, et d'écouter en dormant des adultes consentants. Ils n'ont tout simplement pas leur place dans le monde de l'autisme.
Ils ne doivent surtout plus rafler des sommes astronomiques aux assurés sociaux pour faire régresser des enfants handicapés au point de les rendre dépendants à vie (car c'est bien le résultat d'une des rares évaluations faites en France sur leurs pratiques institutionnelles)

Écrit par : cardinalle | 09/12/2011

Heuuuuu juste une petite (grande) précision pour avoir parlé à la maman qui a fabriqué les affichettes une bonne partie de l'après-midi... Quand elle dit "sortez les journalistes des tribunaux", c'est plutôt dans le sens de ne plus porter plainte contre eux et laissez la presse libre ;o) et donc que bien sur que les journalistes peuvent rendre compte des audiences... je crois qu'il y a eu une mauvaise interprétation... Comme quoi on peut toujours interprèter une phrase comme on veut :D mais là je vous assure que c'était plutot pour soutenir les journalistes (qui si ils font un pas de travers se retrouvent au tribunal, comme Sophie Robert)

Écrit par : Kalanga | 09/12/2011

D'autres affiches disaient : "Autistes et journalistes : même combat" et "Stop à la maltraitance des personnes avec autisme, de leurs familles... et des journalistes" Je le sais car j'étais à Lille et j'ai les photos des différentes affiches qui étaient au sol. Donc je pense que vous avez mal interprété la phrase "les journalistes hors des tribunaux"... car c'est clairement dit pour défendre les journalistes comme l'explique Cardinalle ci-dessus...

Écrit par : Kalanga | 09/12/2011

enfin le désespoir des parents et des enfants qui tombent de façon ignominieusement cachée sous le joug omniprésent de la psychanalyse sans que quiconque ne leur donne l'information , ce traitement qui est encore plus destructeur que le handicap va pouvoir enfin être connu de tous et cesser en France

Écrit par : Sylvie Casanova | 10/12/2011

@Cardinalle, Kalanga, Sylvie Casanova,

Effectivement, je n'avais pas compris dans ce sens-là cette affichette. Merci de vos précisions.

D.S.

Écrit par : didier specq | 10/12/2011

Je vous cite "En gros, Sophie Robert et la coordination nationale Autistes dans Frontières estiment que l'autisme peut être provoqué par des problèmes médicaux neurologiques et que des méthodes comportementales peuvent adapter les enfants à la vie réelle et les rendre plus heureux."

En effet, ce n'est pas Sophie Robert ni ASF qui estiment mais toute la communauté scientifique ! Et ce ne sont pas des problèmes médicaux neurologiques, mais un trouble neurobiologique ! Et ce n'est pas une maladie, mais une différence !

Et bien sur, les méthodes comportementales ne sont pas uniquement là pour rendre nos enfants plus heureux (c'est la conséquence heureuse donc positive de la méthode...on cherche malgré tout à les rendre heureux)....elles ont une visée plus pragmatiques à long terme : les rendre plus autonomes, capables de lire, écrire, compter, de pouvoir utiliser les acquis scolaires pour pouvoir aussi par la suite choisir un métier qui les intéresse, qui les valorise, et non pas enfermés dans des orientations qui ne feront d'eux que des exécutants, payés au lance-pierres, en ESAT (quand ils sont jugés suffisamment rentables pour l'employeur !)...payés au lance-pierres, ça veut dire ? ils n'ont pas l'obligation de les payer plus que 55 % du SMIC...l'Etat leur verse 50 % du salaire et oblige l'ESAT à payer au moins 5 % restant....ce qui veut dire que c'est laissé à discrétion de l'établissement employeur de payer plus....hum....et lorsque j'ai parlé de cela avec une éducatrice, elle m'a dit "Oh non je connais des ESAT qui payent au moins le SMIC !" (oooohhhh quel privilège !) j'ai demandé "mais pour combien d'heures ?" et elle m'a répondu pour 39 heures ! Mais attention, ne va pas en ESAT qui veut !" j'ai demandé "comment ça ?" elle m'a répondu elle même qu'il fallait savoir être productif ! Et encore plus se font cravacher ???? Bigre ! voilà à quoi nos enfants sont condamnés en France ! Ils n'ont pas le droit de choisir les métiers en fonction de leurs centres d'intérêts, on doit les orienter plus jeunes que les autres (alors que justement ils devraient avoir droit à plus de temps pour se former, en principe ?)....et pour vous assurer qu'ils vont bien devoir intégrer un établissement professionnel dans le peu de temps qu'on vous impartit...il y a des âges maximum pour intégrer tel type d'établissement et tel autre pour en sortir....ce qui veut dire qu'un enfant qui n'a pas jamais été scolarisé, faute de moyens, faute de diagnostic permettant de pouvoir procurer les "soins" nécessaires, il n'intégrera pas les établissements ou un an à peine et bien sur, il en sortira à un âge réglementaire, mais sans avoir appris quoi que ce soit de suffisant pour permettre à l'adolescent de pouvoir s'orienter là où il aurait éventuellement pu choisir (si on lui avait permis le choix).

Sophie Robert a simplement mis en lumière que cette psychanalyse qui nous a si longtemps (pour beaucoup de parents) maintenue dans l'ignorance ou l'officialisation d'un diagnostic dont on se doutait déjà depuis des années....comme ça été le cas pour moi...j'ai su que ma fille était autiste vers l'âge de 3 ans environ, mais le diagnostic n'a été posé qu'à l'âge de 7 ans et encore, remis en question par d'autres médecins qui n'aimaient pas leur confrère qui lui avait pris le risque de poser le diagnostic adapté....par la suite, pour la prise en charge, j'ai encore perdu du temps à la faire entrer dans un établissement de soins, car la pédopsychiatre disait qu'il ne fallait qu'une psychanalyse à ma fille, un chef d'établissement spécialisé lui me disait qu'il fallait "un mâle dominant" à ma fille pour l'éduquer....et finalement, vers l'âge de 10 ans, ma fille a été dite (par celle qui disait qu'il ne fallait qu'une psychanalyse) que finalement "elle est plus autiste qu'on ne l'imaginait"....et à la finale, a tout fait pour exclure ma fille de leur établissement de soins, en voulant l'orienter arbitrairement vers un établissement de type IME (qui est un hôpital avec un peu de scolaire)....

Alors les questions de parti pris, qu'on croit, pense ou estime que....on n'en a rien à battre ! Ce n'est pas Sophie Robert qui estime, elle s'est fiée à ses recherches dans le domaine de l'autisme et si les psychanalystes avaient même un peu cherché comme l'a fait Sophie Robert, et qu'ils s'étaient formés et n'étaient pas restés dans leur dogme du rien faire....on n'en serait pas là aujourd'hui !

D'ailleurs, ce qui me fait marrer avec les psychanalystes qui disent que leurs méthodes fonctionnent....je dirais oui, le sabotage fonctionne, en effet ! c'est prouvé et pas besoin de faire appel à la science pour ça ! Car lorsqu'on dit à un parent que son enfant est débile, de le placer en institution et d'en faire un autre....ça s'appelle comment ?

Écrit par : Nathalie Radosevic | 10/12/2011

Merci Didier Specq d'avoir corrigé ;o)

Écrit par : Kalanga | 10/12/2011

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