21/11/2010

Et revoilà les jurés populaires

On sait que les jurés populaires sont présents aux assises qui jugent les crimes. Mais ils sont totalement absents des chambres correctionnelles qui jugent les délits mais aussi les crimes "correctionnalisés" d'un coup de baguette magique! Autrement dit, la population est totalement absente de la quasi-totalité des jugements pris au nom du peuple français. Le gouvernement, une nouvelle fois, se montre favorable aux jurés populaires dans les chambres correctionnelles. On va voir ce que ça va devenir...


Rappelez-vous la commission Léger qui devait réformer la procédure judiciaire française et, notamment, supprimer le juge d'instruction. Une des propositions de la commission Léger portait déjà aussi sur l'introduction de jurés populaires tirés au sort dans les chambres correctionnelles qui jugent la quasi-totalité des affaires pénales en France. Il faut savoir que l'immense majorité des "crimes", viols ou vols à main armée par exemple, sont en fait jugés par les chambres correctionnelles car les cours d'assises sont surchargées.

Comment fait-on? Simple, on tourne la loi. On transforme d'un coup de baguette magique le viol (qui est un crime) en simple agression sexuelle (qui est un délit), ou le vol à main armée (crime) en vol avec violences (délit). Ainsi, plus ou moins avec l'accord de la victime (ou de son avocat), on va trouver qu'un viol n'est pas assez grave pour être digne des assises.

Même chose pour la pharmacienne qui se retrouve avec un toxicomane qui lui met un cutter sur la carotide (on va probablement considérer que c'est un délit) alors que la banque attaquée par des braqueurs sera digne de voir ses agresseurs aller aux assises. Alors que, dans les deux cas, il s'agit bien d'un vol à main armée.

C'est sans doute pour cette raison que Michel Mercier, le nouveau ministre de la justice, vient de parler d'introduire des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels d'abord "pour les délits les plus graves". Sans doute pense-t-il à tous ces crimes "correctionnalisés". Rappelons que le président Nicolas Sarkorzy, quelques jours plus tôt, avait parlé de l'introduction des jurés populaires dans toutes les chambres correctionnelles. On va sûrement en reparler car cette idée trouble beaucoup le petit monde des tribunaux.

Commentaires

Bonjour , A lire certains commentaires " à l'emporte pièce " que l'on trouve sur le net suite à une agression , le comportement délictueux d'un quidam ... sans rien connaître réellement des circonstances précises du délit ; je doute très fort de la perspicacité de cette solution .

Écrit par : Bernard Desmons | 21/11/2010

Votre objection est tout à fait valable. Cependant les jurés sont tout à fait raisonnables, lorsqu'ils examinent avec des magistrats un dossier, lorsqu'ils participent à une session et qu'il y a plusieurs affaires au programme, lorsque -autrement dit- ils siègent aux assises.
Or, aux assises, ce sont les dossiers les plus horribles. On peut donc penser que des jurés dans les chambres correctionnelles seraient aussi raisonnables, sinon plus.

Écrit par : DS | 22/11/2010

@ Bernard Desmons :
pour paraphraser l'excellent blogueur Eolas : il ne faut pas confondre jury populaire et opinion publique. Juger un homme que l'on a en face de soi, après avoir tout appris de sa vie et de ses actes, c'est très différent que d'émettre un avis définitif après avoir vidé son verre de blanc au zinc du café du Commerce.
L'idée d'introduire des jurés en correctionnel ou pour l'application des peines aurait l'effet inverse de celui recherché : les décisions de Mme Michu seraient certainement moins sévères que celles prises par des magistrats professionnels (car Mme Michu a bon coeur).

Écrit par : Darth Vader | 24/11/2010

@Darth Vader

J'ai tendance à partager votre avis. Ou, plus exactement, les priorités répressives ne seraient pas nécessairement les mêmes que celle d'un magistrat professionnel.

Imaginons une affaire de rébellion où le prévenu explique que le contrôle policier a été sans douceur.

Le juré populaire, qui a déjà été contrôlé dans un quartier déshérité alors qu'il conduisait une voiture pourrie, va écouter d'une oreille attentive le prévenu.

A l'inverse, quand on va lui présenter les brigades anti-criminalité comme des cow-boys, le juré populaire va peut-être éprouver plus vite de la sympathie pour les policiers qui se tapent le sale boulot dans les quartiers déshérités, qui viennent effectivement à son secours et qui arrêtent les vrais délinquants.

Écrit par : D.S. | 25/11/2010

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