19/05/2011

USA: revoilà les jurés populaires!

images7.jpegEnfin! On commence à dire en France que la question est finalement simple: soit Dominique Strauss-Kahn dit vrai, soit Nafissatou Diallo dit vrai. Et ce sont des jurés populaires qui vont décider de tout ça... Etonnant, non?


Le chroniqueur judiciaire ne peut s'empêcher de se demander ce qui se passerait, à Lille par exemple dans un grand hôtel, ce qui se passerait donc si une femme de ménage dénonçait les agissements supposés d'un dignitaire quelconque. Une star du rock, un élu célèbre, un grand patron, peu importe. Attention, ce qui se passerait en cas d'agression sexuelle pas évidente. Il y a quelques griffures, des cris, la colère de la présumée victime, des pleurs, une plainte. Mais rien d'évident.

En revanche, s'il y a un coupable, c'est forcément l'occupant célèbre de la chambre. Est-ce que, dans les minutes qui suivent, la police française débarque avec des spécialistes pour isoler la chambre et recueillir toutes les traces possibles d'ADN, de cheveux, d'empreintes, de mouvements dans les meubles, d'objets cassés? Est-ce que, dans les minutes qui suivent, le suspect est interpellé, ce qui permet, entre autres, de recueillir sa première version et ses vêtements, traces corporelles, téléphones portables? J'ai comme un doute.

En revanche, dans les minutes qui suivent, le procureur général à Douai et le ministère de la justice sont avertis puisque le procureur de Lille dépend du gouvernement. Il n'est pas élu, comme à New-York, il va donc demander au pouvoir ce qu'il doit faire. Ce qui ne retire rien à son honnêteté mais avouez que le contexte est différent.

A New-York, les services du procureur (les crédits qui font marcher la boutique dépendant en grande partie de l'efficacité réelle ou supposée du procureur élu) doivent démontrer qu'ils défendent le peuple. Des dérives sont possibles effectivement. Mais force est de constater que la femme de ménage a l'air de compter beaucoup pour eux.

Encore une fois, je parle d'une agression possible où rien n'est évident. Je ne parle pas d'un meurtre ou d'un viol avec de multiples coups où il est incontournable que l'agresseur est un agresseur. Or, très souvent, les femmes sont confrontées à des agressions qui ne sont pas absolument évidentes: les coups sont restés "légers", les intimidations sont difficilement prouvables, les pressions du puissant peuvent s'apparenter à une drague appuyée, elles étaient dans un chambre ou un bureau fermés, etc.

Enfin, aux USA, pour savoir si l'enquête continue et si l'affaire peut aller au procès, les protagonistes doivent être entendus par des magistrats élus et surtout un jury. Des jurés populaires tirés au sort sur des listes électorales! Tout ça ne vous rappelle rien? C'est exactement ce qui serait impossible en France selon l'immense majorité des politiques, des magistrats et des avocats...

En tous, au moment où j'écris, Nafissatou Diallo témoigne devant ces 22 jurés populaires.

Didier Specq

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