Péripéties judiciaires

Récemment, sur ce même blog, nous le disions: on ne voit pas comment un juge indépendant en référé (procédure d'urgence) pourrait interdire, s'il est saisi par Dieudonné, un spectacle a priori.

Même condamné à plusieurs reprises pour des propos antisémites (et relaxé aussi très souvent), on discernait mal comment le ministre d'intérieur Manuel Valls pourrait faire interdire un spectacle.

"C'est un meeting" répondait en substance Manuel Valls en oubliant sans doute qu'un meeting est aussi protégé par la liberté d'expression... Un seul exemple de spectacle annulé avant qu'il est lieu existait: un "lancer de nains" qui, effectivement, avait évidemment pour objet de "lancer des nains" et portait atteinte à la liberté humaine.

Bref, ça n'a pas loupé: après avoir donné une énorme publicité aux spectacles de Dieudonné qui va se produire à travers toute la France, le préfet agissant sur l'ordre de Manuel Valls a vu son arrêté infirmé par le juge du référé administratif de Nantes. Le juge administratif a estimé en effet que le spectacle de Dieudonné "ne peut être regardé comme ayant pour objet essentiel de porter atteinte à la dignité humaine".

Quant à la grosse ficelle brandie par Arno Klarsfeld ("il va y avoir des contre-manifestants et des troubles, donc le spectacle devrait être interdit"), elle a été bazardée elle-aussi par le juge: "Le risque de troubles à l'ordre public, pour lesquels il n'est pas établi que le préfet ne disposait pas des moyens, ne pouvait fonder une mesure aussi radicale que l'interdiction de ce spectacle".

Bref, pour reprendre les termes parfois employés par la police: "Circulez, il n'y a rien à voir". Restent, pour ceux qui effectivement veulent combattre l'antisémitisme, les questions posées par les assertions posées par Dieudonné. Mais l''acharnement contre un homme ne constitue certes pas la bonne réponse.

Didier Specq