31/03/2011
Emprisonné, handicapé, muet, sans avocat...
On ne sait pas bien ce qui se passe dans la tête de Gérald R., arrêté le 25 février dernier au volant d'une voiture folle. On sait qu'il a été écrabouillé par une voiture alors qu'il avait 18 ans. Et il n'a pas d'avocat pour nous l'expliquer...
Gérald R. est lourdement handicapé physiquement et il se traîne avec des béquilles. Gérald R. est handicapé mentalement car son cerveau a été abîmé par l'accident qu'il a subi alors qu'il était le passager d'une voiture accidentée. Gérald R. est totalement muet. Avec des mots griffonnés sur un papier et lu par un policier, Gérald R. se plaint parce que, mardi alors que son affaire doit être jugée sur le fond, il n'a pas d'avocat près de lui. "Quelqu'un" doit venir, mais "quelqu'un" ne vient pas...
Par gestes, il nous explique qu'il a vu pourtant son avocat dans les geôles mais on n'arrive pas à comprendre s'il s'agit d'aujourd'hui ou de la dernière fois quand son procès a été renvoyé... Il est sous tutelle mais son responsable de tutelle n'est pas là non plus. Bref, rien ne fonctionne...
Tout le monde a l'air d'accord pour que Gérald R. (qui est récidiviste de la conduite aventureuse et qui a failli renverser deux policiers) soit renvoyé en prison sans autre forme de procès. C'est vrai, ça "l'avocat" n'est pas là... "Cela fait trois fois que mon procès est renvoyé!" se plaint, par le truchement d'un petit billet, le prévenu handicapé... La présidente lui explique que non: il est passé d'abord devant un juge de la détention et de la liberté un samedi (car il avait été arrêté un vendredi) qui l'a envoyé en prison, puis le lundi devant une chambre correctionnelle qui a renvoyé le dossier et qui l'a envoyé en prison puis, hier mardi, devant des juges qui vont une nouvelle fois le renvoyer en prison. Bref, ça fait bien trois fois...
Personne ne désigne d'office un avocat pour s'occuper de Gérald R., regarder son dossier et plaider l'affaire un peu plus tard. Si, un seul: Me Charles Lefebvre se propose mais ça n'a pas l'air de plaire.
La présidente, émue quand même, demande au prévenu si ça va en prison. L'emprisonné lui répond que "c'est la galère, il ne peut même pas se doucher". Et, hop, on l'expédie en prison, lui et ses béquilles, lui et son silence. L'avocat payé par l'argent des contribuables, n'est toujours pas là... Magistrats, procureur et avocats dans la salle ont l'air de trouver ça normal. Ah, oui, hier mardi, il y avait une manifestation à Paris pour la défense de la Justice.
Didier Specq
09:15 | Lien permanent | Commentaires (0)
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