15/04/2011

Ce n'est pas une révolte, c'est une révolution

images.jpegLa Cour de Cassation a imposé une réforme totale de la garde à vue à la française dans les minutes qui suivaient le prononcé de son arrêt. Une révolution!


Nicolas Sarkozy, qui a laissé percer à de nombreuses reprises la défiance que lui inspiraient les juges, est sans doute en train de régler la facture.

On sait que, depuis longtemps, la Cour Européenne des Droits de l'Homme exigeait la présence effective de l'avocat durant la garde à vue selon des modalités qui restaient à définir.

La France, comme souvent, faisait mine de croire que ces règles devaient s'appliquer à la Suède, à la Turquie ou à la Lituanie mais pas à elle. Rappelons qu'en France, jusqu'à hier, l'avocat ne peut consulter les procès-verbaux, ne peut assister son client lors des interrogatoires et devait en rester à une présence symbolique pendant une demi-heure sans pouvoir dire autre chose que des mots de réconfort.

Les condamnations de la CEDH ont été plus précises. Pas de réaction. Les condamnations de la CEDH sont devenues impérieuses. Le Conseil Constitutionnel et la Cour de Cassation ont dû rappeler que les gardes à vue devaient être modifiées impérativement et que ces gardes à vue inconstitutionnelles devaient être balayées avec le 1er juillet 2011. C'était amusant d'ailleurs car les éminents magistrats de ces cours suprêmes expliquaient en même temps que c'était illégal mais que ça pouvait tout de même attendre jusqu'à juillet.

Le gouvernement s'est mis à se "hâter lentement" comme dirait La Fontaine, l'assemblée nationale commence la discussion. Bref, la Cour de Cassation en a eu marre: vendredi à 16 h, l'arrêt définitif est prononcée à la Cour de Cassation et l'application est immédiate sans attendre le vote de la loi et la sortie des décrets! Une révolution à la hussarde: l'Europe a raison et la Cour de Cassation, quand les grands principes sont en cause, est plus forte que le gouvernement.

Aussitôt, dans tous les tribunaux, les avocats s'organisent pour être là tout le temps qu'il le faut. Et, dans tous les commissariats, on s'apprête à faire face à l'impensable: des avocats qui vont jeter un oeil sur les enquêtes et qui conseilleront leurs clients pendant les interrogatoires. A 16 h, vendredi au commissariat de Roubaix, ça commence: deux avocats (de la permanence pénale, autrement dit des avocats "gratuits") débarquent pour assister trois gardés à vue. C'est parti...

Didier Specq

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