08/09/2011

Hitler, Galliano et les journalistes

john galliano.jpegMais pourquoi une amende avec sursis pour Galliano?


Mine de rien, les magistrats viennent de poser un sacré problème aux journalistes: comment parler de propos abjects sans provoquer encore plus de publicité autour de ces mêmes propos?

On se souvient des considérations reprochées à John Galliano, l'ex-créateur présumé génial de la maison Dior: "J'aime Hitler, des gens comme vous devraient mourir". Une plainte puis une vidéo étaient venues conforter les accusations. Jeudi, à Paris, la très chic 17ème chambre correctionnelle (qui a vu passer toutes les stars comme plaignantes) a rendu son jugement: une amende de 6000 euros avec sursis. Une décision qui peut apparaître clémente.

A lire les attendus du jugement, on s'aperçoit que les magistrats ont également jugé, indirectement, un certain journalisme. Bien sûr, les juges de la 17ème rappellent que "toute injure proférée à raison de l'origine ou de la religion est d'une singulière gravité en ce qu'elle nie les principes fondamentaux de respect de la dignité de chaque être humain". Bien sûr, les juges notent l'assuétude de John Galliano à l'alcool et aux drogues. Bien sûr, les juges soulignent les regrets du prévenu qui, par ailleurs, se soigne. Rien que du très classique.

Toutefois, les magistrats reviennent sur la fameuse terrasse du bistrot où, très tardivement et s'adressant à quelques noctambules, John Galliano avait lancé ses vociférations douteuses: "la publicité de ces propos n'était pas destinée à dépasser les quelques personnes se trouvant sur les lieux lors des faits; l'extrême publicité qui en a été faite par la suite n'incombant pas au prévenu". En peu de mots, tout est dit: selon la 17ème, la surmédiatisation de ces propos était également condamnable. La clémence provient de ce rapport déséquilibré entre l'audience limitée de la terrasse du bistrot parisien et la publicité planétaire des propos. A bon entendeur, salut.

Didier Specq

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