17/09/2011
les magistrats sont taquins
Délicieux! Hortefeux asticoté par la Cour d'Appel de Paris!
Les magistrats! C'est une corporation qui n'est pas connue pour son humour ravageur et, pourtant, on se trompe en pensant que seule la défense est parfois rigolote. En plus, les magistrats, à l'écrit, peuvent peaufiner leur texte avec une petite touche de sadisme genre le chat Raminagrobis jouant avec la belette et le petit lapin.
Tout le monde se souvient de cette vidéo tournée un peu à la sauvette lors d'une réunion UMP dans une ville du Massif Central dont nous avons oublié le nom. C'est dans cette vidéo que le ministre déclare (entre autres): "Quand y'en a un ça va, c'est quand y'en a plusieurs qu'il y a des problèmes". Bien sûr, cette phrase s'adresse à des militants UMP et concerne le jeune Amine qu'une militante de l'UMP vient de présenter comme étant un jeune homme qui "parle arabe", qui est "catholique" et "mange du cochon et boit de la bière".
Hortefeux répond: "Ah, mais ça ne va pas du tout, ça, il ne correspond pas du tout au prototyme alors". Commentaires de Raminagrobis-La cour: "Considérant toutes les personnes d'origine arabe comme pratiquant la religion musulmane, ce qui témoigne d'un manque évident de culture, le ministre (de l'intérieur), notamment en charge des cultes, s'offre un malheureux trait d'humour destiné à souligner ce qui constituerait une particularité venant bousculer des schémas simplistes et quelque peu réducteur". Et toc.
Pour la Cour, jusque là, le ministre de l'intérieur et des cultes Hortefeux est inculte mais ne tient pas encore de propos racistes. Tout ça se gâte quand, après que la militante ait précisé "c'est notre petit Arabe", Hortefeux explique que "c'est quand y'en a plusieurs qu'il y a des problèmes". Raminagrobis: "Ne se référant à aucun fait précis, le propos, qui vient conforter un des préjugés qui altèrent les liens sociaux, est outrageant et méprisant à l'égard de l'ensemble du groupe formé par les personnes d'origine arabe stigmatisées du seul fait de cette appartenance, ce qui le rend punissable". Et, pof, coup de griffe acéré sur Brice Hortefeux.
Normalement, pour engager une procédure, il n'existe que deux façons de faire. Soit le procureur poursuit, ce qu'il n'a pas fait. Soit la victime directe (Amine) déclenche la procédure. Mais il ne l'a fait pas fait non plus. Il existe une dérogation: le MRAP, organisation anti-raciste déclarée d'utilité publique, peut agir à la place de tout le monde.
Mais, selon la Cour, uniquement pour un délit. Or, là, il s'agit de propos tenus dans le cadre d'une réunion et d'une discussion privées. Des propos qui ne sont pas confidentiels mais qui ne sont non plus destinés à être rendus publics. Donc c'est une contravention. Et, pof, deuxième coup de griffe acérée qui atteint cette fois le MRAP. Lequel, en 2006, avait attaqué Charlie-Hebdo (qui avait publié des caricatures du prophète Mahomet). Charlie-Hebdo avait été relaxé et le MRAP déjà complètement débouté.
Dans la fable de La Fontaine, effectivement, à la fin de l'histoire, le chat Raminagrobis mange à la fois la belette et le petit lapin qui avaient porté un conflit devant sa juridiction.
Didier Specq
09:50 | Lien permanent | Commentaires (0)
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