26/11/2011
DSK et l'inquisition (procédurale)
Mine de rien, l'affaire DSK démontre que la procédure inquisitoire, à la française, est la meilleure.
Une nouvelle fois, une enquête journalistique américaine indique que les zones d'ombre, à propos de ce qui s'est pas passé dans la chambre d'hôtel du Sofitel, restent importantes.
On se souvient de la disparition du juge d'instruction souhaitée par Nicolas Sarkozy. Une réforme finalement abandonnée. Certes, aujourd'hui, la plupart des dossiers au pénal sont l'objet de procédures rapides où il n'y a pas de magistrat instructeur. Il n'empêche que les juges d'instruction restent au centre du dispositif judiciaire français pour les affaires complexes où il est impossible de s'en tenir aux procès-verbaux de police et à la parole de l'accusation.
La procédure accusatoire à l'américaine a montré concrètement que, pour ces évènements du Sofitel, il était impossible au fond de savoir la vérité.
On s'en est tenu à la parole de l'accusation. "Impossible de tenter de démontrer raisonnablement une quelconque culpabilité" estime le procureur de New-York. On en reste donc là sans se demander pourquoi la victime annoncée aurait menti. Elle n'est pas assez crédible, ça suffit aux magistrats américains. On ne demande même pas à DSK ce qui, selon lui, s'est passé et, d'ailleurs, ses avocats lui déconseillent d'expliquer en France, même après le procès, sa version des faits. Car, qu'on le veuille ou non, il y a bien eu un rapport sexuel en moins de 8 minutes. Ce qui semble tout de même assez rapide pour un coup de foudre débouchant illico sur un rapport intime.
Admettons d'abord qu'en France, dans des circonstances similaires, la plainte de la femme de ménage ait été immédiatement prise en compte par la police, que tout de suite un fourgon de police scientifique arrive sur place pour opérer les prélèvements, découper la moquette et interroger les témoins directs et que, dans les minutes qui suivent, le dignitaire politique soit arrêté.
Un juge d'instruction sera saisi dans la foulée par le procureur. Ce magistrat ne se contentera pas des constatations de la police et de la thèse du procureur. Il va rechercher la vérité car nous sommes en France dans une procédure inquisitoire. En France, comme dans les pays latins marqués par le catholicisme (Europe de l'ouest et Amérique Latine), on veut savoir. On ne se contente pas dire: l'accusation et la victime sont-elles crédibles ou non.
En France, les raisons profondes du comportement de la femme de ménage, le récit de DSK (il n'aurait pas pu garder le silence sous peine de voir le procès se retourné totalement contre lui), les bizarreries diverses et variées (le Black Berry disparu, les vigiles qui se réjouissent, les contacts de la victime présumée) auraient été étudiés par le menu.
C'est toute la différence entre l'affaire du Sofitel à New-York et celle dite du Carlton à Lille: les magistrats instructeurs lillois, avec la procédure inquisitoire, font tout pour connaître la vérité. Finalement la procédure inquisitoire n'a qu'un seul défaut: elle rappelle trop l'inquisition, c'est mauvais pour l'image.
Didier Specq
11:23 Publié dans Actualités, Affaire Carlton, Justice | Lien permanent | Commentaires (0)
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