Péripéties judiciaires

Au final, les sommes investies par David Roquet (responsable d'une filiale à 100% d'Eiffage) et Fabrice Paszkowski (responsable d'une société de fourniture de matériel médical) dans leurs relations avec Dominique Strauss-Kahn ne semblent pas si importantes que ça. Elles semblent se compter en dizaines de milliers d'euros. Mais, pour un groupe comme Eiffage, est-ce trop cher pour entretenir de bonnes relations avec l'ex-futur président de la République? Et, pour Fabrice Paszkowski, ami intime et politique de DSK, est-ce trop cher payé pour fréquenter son idole?

Ajoutons qu'il n'est même plus sûr et certain que l'abus de bien social puisse tenir longtemps pour David Roquet et Fabrice Paszkowski. A priori, pour David Roquet, défendu par Me Eric Dupond-Moretti et incarcéré depuis la mi-octobre, sa mise en cause pour abus de bien social n'est même plus d'actualité. Quant à Fabrice Paszkowski, défendu par Me Karl Vandamme, la plupart des factures ont été réglées sur sa cassette personnelle. La mise en cause de DSK pour des recels d'abus de biens sociaux, eux-mêmes si peu établis, s'éloigne donc.

Reste une éventuelle mise en cause de DSK dans l'affaire de proxénétisme elle-même. René Kojfer, défendu par Me Hubert Delarue, David Roquet et Fabrice Paszkowski ont indéniablement facilité la prostitution d'autrui. Le délit est donc constitué, peut-être le crime puisque, juridiquement, la participation à une bande organisée en vue d'un proxénétisme aggravé, est passible des assises. Mais on va sans doute correctionnalisé tout ça dans l'avenir. Mais, justement, les deux indéfectibles supporters de DSK affirment sur tous les tons que l'ex-directeur du FMI ignorait que les "copines" étaient parfois des prostituées. DSK, au hasard d'une "partie fine", n'a donc pas pu faciliter la prostitution d'autrui, mettre en relation, servir d'intermédiaire puisque l'élément intentionnel fait juridiquement défaut. La mise en cause de DSK semble aussi s'éloigner à grands pas de ce côté-là aussi.

Le troisième incarcéré, René Kojfer, se refuse également à mettre en cause DSK sous cet angle. Certes, dans le cadre d'une instruction criminelle, les juges peuvent maintenir en détention une année les mis en examen. Mais, pour des personnes jamais condamnées, alors que toutes leurs déclarations sont sur procès-verbal depuis longtemps, la détention va finir par paraître abusive. Et nul doute que certains observateurs à l'esprit mal tourné vont finir par croire que c'est parce qu'ils ne mettent pas en cause DSK qu'ils restent incarcérés.

Bien sûr, il reste les volets belges de l'affaire. Mais même "Dodo la Saumure", toujours très en forme, a été remis en liberté. Restent également les mises en cause de deux responsables du Carlton et d'un chef policier. Toutefois, par rapport au démarrage sur les chapeaux de roues de ce dossier croustillant, on risque bien à l'arrivée d'aboutir sur une affaire finalement de faible envergure.

Didier Specq