23/02/2012

Quand les femmes sont victimes

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Arnaque. Comment transformer d'un coup de baguette magique un viol en "simple" agression sexuelle...

Grâce à l'action des féministes des années 70, depuis 1980, la loi sur le viol, en France, est très précise. Pas d'échappatoires, de "cependant" ou de "quoique". La loi, c'est ça: "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui, par violence, menace, contrainte ou surprise, est un viol". Et cet acte est un crime, c'est l'article L222-23 du code pénal. La formulation de la loi est sèche presque mécanique. Mais elle possède un avantage: elle est claire.

Pourtant, parce que les cours d'assises sont surchargées, depuis longtemps, en France, on a pris l'habitude de juger la majorité des viols comme s'il s'agissait de simples délits. Je me demande toujours pourquoi si peu de monde s'en scandalise. Comme si, d'un côté, on pouvait produire toutes les statistiques les plus ahurissantes sur les agressions sexuelles (sans vérifications possibles puisqu'il s'agit d'affaires inconnues ou non jugées) tout en tolérant en catimini, de l'autre côté, une banalisation du viol jugée comme un délit parmi d'autres. Le blabla victimaire en expansion, d'un côté, et la réalité bien peu avouable, de l'autre.

Au départ de ce mouvement insidieux de banalisation voici quelques années, les procureurs s'excusaient au moment du réquisitoire de la "correctionnalisation" suscitée par la surcharge de la justice. Aujourd'hui, la plupart du temps, on ne dit même plus que c'est en accord avec la victime. D'ailleurs, on peut s'interroger sur l'accord de la victime. Dans ce dossier par exemple, jugé mardi à Lille, la victime a-t-elle donné un consentement parfaitement libre? Elle a été violée chez elle, alors que les enfants dormaient dans la pièce d'à côté, par un homme qui connait toutes ses habitudes, qui l'a menaçée ensuite, qui ne fait pas du tout amende honorable, qui la toise de haut au tribunal. Le tout dans une modeste maison qu'elle ne peut pas quitter. La victime n'est-elle pas tentée de "ne pas en faire trop" avec son viol?

Les magistrats ont même pris l'habitude de parler de consentement de la victime quand il s'agit de personnes handicapées mentales ou d'enfants. Alors que, bien sûr, c'est une association travaillant tous les jours avec l'appareil judiciaire qui donne son accord.

Le tour de passe passe juridique est simple: on fait semblant que la "pénétration" dont parle la loi est une agression sexuelle. Le crime, d'un coup de baguette magique, devient un délit. Et personne ou presque ne s'offusque de ce détournement traditionnellement mis sur le compte de la surcharge des cours d'assises. Alors que, bien sûr, il suffirait de multiplier les chambres d'une cour d'assises surchargée pour juger ces dossiers douloureux.

Didier Specq

09:02 Publié dans Féminisme | Lien permanent | Commentaires (1)

Commentaires

D'accord sur tout. Sauf sur un bout de phrase : "Il suffirait de..." multiplier les chambres dune cour d'assises. Plus de chambres, c'est plus de jurés populaires, donc c 'est plus long et c'est plus cher. C'est la crise, cher Didier Specq ! Demandons 35 euros aux femmes qui se disent victimes de viol pour avoir droit à être entendue, nous réduirons considérablement la dette publique (j'étais en mode ironie, je précise...)

Écrit par : Darth Vader | 15/03/2012

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