23/05/2012

DSK: un procureur de Lille très, très prudent...

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Des mois de réflexion pour une décision très peu décisive. Alors, viol en réunion?

On se souvient plus ou moins des rebondissements de l'affaire dite du Carlton. La principale personnalité visée, en l'occurrence Dominique Strauss-Kahn, se retrouve sans arrêt sur la sellette alors qu'en réalité, sa mise en examen reste fragile. Le recel d'abus de biens sociaux, naguère agité contre DSK, a fait flop puisque même les trois juges d'instruction lillois ont abandonné cette idée en ce qui concerne l'ex-directeur du FMI.

Reste donc pour l'instant la mise en examen pour "proxénétisme en bande organisée" qui frappe Dominique Strauss-Khan. Une mise en cause qui, si l'on a bien compris, repose sur l'idée suivante: au cas où l'ex-leader socialiste aurait su que des prostituées participaient aux partouzes, il aurait servi en quelque sorte d'intermédiaire quand l'une des "filles" passait des bras de l'un aux bras de l'autre. Ou alors DSK aurait servi d'intermédiaire en contribuant à organiser ses soirées pimentées.

Juridiquement, c'est tenable puisque la loi sur le proxénétisme fait du citoyen un proxénète dès qu'il "facilite" la prostitution d'autrui. Et "faciliter", en France, c'est très, très large, il suffit de se pencher sur la jurisprudence. Moralement, on peut bien sûr condamner DSK et ses soirées libertines très friquées. Mais, concrètement, on avouera que sa mise en cause repose sur bien peu de choses.

En décembre dernier, dans le secret de l'instruction, surgit donc une nouvelle accusation: une prostituée ou une "libertine" (la nuance semble parfois indistincte dans cette affaire) explique que, dans une soirée aux USA où elle se livrait à des "actes de lubricité" (comme dit le code pénal) parfaitement consentis, un rapport sexuel aurait été subi. Elle a dit "non" mais un des protagonistes (DSK) aurait continué en la tenant par les cheveux tandis qu'un autre (le directeur d'une filiale d'Eiffage) lui tenait les mains.

L'affaire, plusieurs mois après les témoignages recueillis en décembre dernier par les enquêteurs, vient de faire l'objet de l'ouverture d'une "enquête préliminaire" par Frédéric Fèvre, le procureur de la République à Lille.

D'abord, à propos de cette dénonciation de ces présumés faits à "toutes fins utiles" par les trois magistrats instructeurs, le procureur avait indiqué à la presse, fin avril, qu'il donnerait sa position après l'élection présidentielle. L'objectif est claire: ne pas interférer avec des échéances politiques. Force est de constater que le procureur de Lille a été très, très prudent: il a attendu l'élection, la formation du gouvernement et même le voyage inaugural de François Hollande aux USA qui y rencontrait ses partenaires du G8.

Mais cette prudence n'est pas que politique. Le procureur se borne a ordonner l'ouverture d'une enquête préliminaire alors que les juges s'attendait sans doute à ce qu'on leur délivre un "réquisitoire supplétif" qui les aurait autorisés à enquêter sur cet éventuel "viol en réunion".

Me Gérald Laporte, l'avocat des prostituées dans ce dossier, a d'ailleurs tout de suite réagi en parlant d'un "coup d'épée dans l'eau". En effet, l'enquête préliminaire, en quelque sorte, a déjà été opérée puisque la présumée victime et les témoins sont déjà été interrogés pour ce viol en réunion par les enquêteurs. Et, d'ailleurs, les charges sont faibles: la victime ne veut pas porter plainte, les protagonistes et les témoins n'ont rien vu de violent dans cette soirée américaine. On comprend donc mieux la prudence infinie du procureur face à des charges tenues.

Certes, l'enquête peut réserver encore des surprises. Il n'empêche que les juges eux-mêmes, quand ils apprennent en décembre dernier cet éventuel viol en réunion, ne semblent pas s'en inquiéter immédiatement. Même chose pour le procureur par définition rapidement au courant des aléas de l'enquête dans cette instruction suivie à la loupe.

Aujourd'hui, devant la chambre d'accusation de la Cour d'Appel de Douai, les avocats de DSK demandent la modification de son contrôle judiciaire. Notamment la modification de son obligation, précisée par les juges d'instruction, de ne pas parler aux journalistes. On peut certes n'avoir aucune sympathie pour le personnage DSK. Il n'empêche que, au moment où sans arrêt on parle de DSK à propos de "proxénétisme" et de "viol en réunion", on comprend que l'intéressé ait envie de dire quelques mots à ce sujet.

Didier Specq

Commentaires

On reste quand même sans voix devant toute cette histoire.

Écrit par : Odeladeule | 24/05/2012

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