Péripéties judiciaires

Pour une fois, les chiffres sont incontestables: le 1er juillet 1992, quand on installe le permis à points et les radars automatiques, la circulation automobile tue presque 10.000 personnes par an. 20 ans après, aujourd'hui, on tourne autour des 4.000 tués. (dans les 30 jours qui suivent l'accident). Bref, au moins 5.000 vies humaines économisées par an.

Un tel succès étatique devrait être fêté. Or, le moins que l'on puisse dire, c'est que la fête est discrète.

Pour plusieurs raisons. D'abord, c'est un effort continu, complexe, pragmatique. Pas un effort idéologique susceptible d'entretenir l'adhésion de ses partisans. Les effets n'ont pas été évidents tout de suite et on peut rappeler d'ailleurs que l'instauration du permis à point avait entraîné le blocage des routes françaises par les routiers. Il est toujours difficile de tenir un long raisonnement et une phrase coup de marteau aura toujours plus de succès.

Bien sûr, s'attaquer à la voiture ne plait guère dans une France qui dépend toujours beaucoup des transports individuels motorisés.

Ceci dit, d'autres raisons idéologiques peuvent sans doute être invoquées. La répression n'a pas bonne presse et cette baisse spectaculaire de la mortalité routière, alors que la circulation des véhicules n'a pas baissé, est entièrement imputable à une politique répressive! On peut certes évoquer aussi le renforcement de la sécurité passive des véhicules mais cela n'agit sans doute qu'à la marge.

Aujourd'hui, 80% des automobilistes roulent avec un permis qui affiche toujours les 12 points et rares sont les annulations de permis qui proviennent uniquement de l'accumulation de petites infractions (d'autant qu'un point unique est récupéré automatiquement dans les 6 mois).

Ce matin, Marine Le Pen était reçue par BFM. Est-ce que cette responsable politique, qui se plaint sans arrêt de l'absence de politique répressive, allait s'enthousiasmer pour les résultats engrangés par le permis à points et la lutte contre les infractions routières? Pas du tout. Aux questions très nettes de Bourdin, elle a répondu qu'elle était pour la suppression pure et simple du permis à points...

C'est ainsi: 5000 morts économisées chaque année n'attirent que peu d'enthousiasme et on trouve même des responsables pour préconiser la suppression pure et simple du permis à points!


Didier Specq