04/09/2012
Manuel Valls, héros de la "gauche populaire"
La trajectoire étonnante d'un éléphant socialiste.
Lors des "primaires" socialistes, on l'a connu plutôt placé à la droite du parti socialiste. Et puis le fracas des primaires oubliés, l'élection présidentielle remportée et passée aux côtés de François Hollande, on retrouve Manuel Valls à un poste-clé: le ministère de l'intérieur.
Poste-clé? Il suffit de rappeler que, depuis les municipales souvent perdues par les socialistes en 1983, la délinquance a toujours été un thème majeur des débats électoraux nationaux. Sauf, justement, lors des dernières présidentielles, quand l'échec de Nicolas Sarkozy sur ce front, qu'il a toujours désigné lui-même comme décisif, a empêché la droite d'enfourcher une nouvelle fois ce thème tranquille pour elle. L'éternel procès en "laxisme" opéré contre la gauche (et subsidiairement les magistrats) n'a pas pu s'effectuer.
Manuel Valls arrive donc à point nommé au ministère de l'intérieur: la délinquance ne cessera pas d'être un thème majeur dans les débats actuels et futurs mais, pour une fois, ce terrain est moins passionné et la gauche gouvernante peut montrer ce qu'elle sait faire. Ajoutons que, dans le climat actuel de crise économique, il n'est pas négligeable, pour la présidence Hollande, d'avoir un ministre solide sur un secteur-clé où l'opinion est très réactive.
Bien sûr, quand nous parlons de "gauche populaire", nous évoquons deux données à la fois. Emmené par le politologue Laurent Bouvet, la "gauche populaire" s'affiche comme un petit groupe de réflexion qui possède un blog très intéressant et très ouvert.
La thèse de ce groupe est simple: les socialistes ont entamé la reconquête de l'électorat populaire mais ça reste loin d'être terminé et solide. Or, qu'on le veuille ou non, le corps électoral est composé en majorité d'ouvriers, de chômeurs, d'employés salariés dans les catégories les plus mal payées de la fonction publique et des services. Le peuple n'est pas composé de bobos chevauchant des bicyclettes dans les centres villes.
Pour ce groupe, les propositions "sociétales" (mariage homosexuel, vote des étrangers lors des municipales, etc) sont importantes mais ne doivent pas se retrouver au centre des propositions gouvernementales. La "gauche populaire", d'ailleurs, n'hésite pas à effectuer des tris qui énervent parfois la bien-pensance socialiste: ainsi, si la "gauche populaire" est pour le mariage homosexuel, elle se prononce contre le vote des étrangers aux municipales...
L'intervention de Laurent Bouvet, le 25 août dernier à l'université socialiste de La Rochelle, a été très écoutée. Sur la tribune, à quelques mètres de l'orateur, Manuel Valls.
Avec les émeutes d'Amiens comme lors de l'évacuation de plusieurs campements "roms", Manuel Valls a assuré. En même temps, bien sûr, la gauche "sociétale" a criblé de flèches Manuel Valls. Les critiques ont fusé par exemple chez les écolos d'EELV qui sont d'autant plus virulents qu'ils doivent par ailleurs avaler de très grosses couleuvres par exemple sur le nucléaire. Critiques cinglantes aussi dans la gauche des associations soutenant les Roms.
Mais, même dans la sphère socialiste, les soutiens sont comptés. On a noté par exemple les hésitations de Martine Aubry qui a souligné l'absence de solutions de rechange pour les campements lors de l'évacuation de celui de Villeneuve d'Ascq. Martine Aubry a expliqué qu'elle aurait souhaité plutôt une solution qui aurait été un camp de rechange hors de la métropole de Lille (il n'est pas sûr d'ailleurs que les Roms souhaitent se retrouver en pleine campagne loin des zones de mendicité et de ferraillage). Lors d'un interview récente à Libération, la ministre de la justice Christiane Taubira n'a pas eu un mot de soutien pour Manuel Valls alors qu'elle était interrogée sur ces questions.
Sur les événements d'Amiens, on a noté en revanche l'intervention de Jean-Luc Mélenchon qui a qualifié les incendiaires des services publics de "crétins". Ce qui tranche bien sûr avec les propos lénifiants entendus habituellement sur ce genre de violences urbaines.
Jean-Luc Mélenchon, Laurent Bouvet ou Manuel Valls, chacun à leur façon, savent très bien qu'à 99% la délinquance de rue est subie par les citoyens les plus modestes. Il va falloir scruter les enquêtes d'opinion: il est probable que, bientôt, Manuel Valls va compter parmi les ministres les plus populaires. Il est probable d'ailleurs que certaines critiques, très peu comprises dans l'opinion, vont renforcer la popularité du ministre de l'intérieur. En revanche, on doit noter le renouveau d'une donnée habituelle: le titulaire de l'intérieur et la garde des sceaux ne semblent pas siéger dans le même conseil des ministres...
Didier Specq
09:00 Publié dans Justice, police, Politique | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
article fort intéressant, oui la déliquance touche bien les classes les plus pauvres et exceptionnellement (drogues dures) .
Manuel VALLS va en effet compter dans l'avenir de la nation, par ses prises de position, sans envie de faire bouger les choses, sa détermination et son grand carisme.
Je l'apprécie bcp l'ayant vu à plusieurs reprises, notemment quand ilomm est venu soutenir KATY GUYOT, un homme de terrain, un homme de coeur, un homme simple....
Écrit par : COLSON CATHERINE | 04/09/2012
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