11/04/2013

La journée du patrimoine

jérôme cahuzac.jpeg

L'affaire Cahuzac a le mérite de montrer à quel point, en plein scandale, les politiques rechignent à montrer leur patrimoine.

Bien sûr, le patrimoine, directement, ne démontre rien. Bien sûr, un héritage d'une grand-mère décédée récemment n'explique pas l'absence d''honnêteté de telle ou telle personne. Mais, comme toujours, la justice, l'opinion, la critique argumentée ne peuvent reposer au départ que sur des indices. Et la transparence du patrimoine peut constituer un indice.

D'abord parce que l'argent gagné illégalement et planqué à l'étranger finit souvent par ressortir en France sous la forme d'un achat inconsidéré. Indice qui peut être précieux. Ensuite parce que la transparence du patrimoine des politiques et des hauts fonctionnaires va forcément pousser certains à manoeuvrer pour échapper justement à cette transparence. Et, donc, un nouvel indice va peut-être apparaître lors d'une manipulation peu habile.

Quant à l'argument sur la "vie privée", il est assez extraordinaire: rappelons aux puissants que pour l'immense majorité des gens -ceux qui n'ont comme richesse que leurs salaires- la transparence est totale vis-à-vis du fisc, de l'employeur, des caisses de retraite, de la sécu et de nombreux organismes qui, simplement pour accorder une carte de cantine, exigent la déclaration d'impôts voire le jugement de divorce!

Bien sûr, on peut estimer que les déclarations vérifiées (par qui et seront-elles vraiment publiques?) des éventuels conflits d'intérêts sont plus importantes que la transparence du patrimoine. Mais on imagine tout de suite comment, dans quelques mois, ces conflits d'intérêts seront minimisés. Seront-ils étendus d'ailleurs aux conjoints, aux proches, aux parents? Là encore, la possession d'un patrimoine étonnant pourrait être un indice et, en l'absence d'ailleurs de toute poursuite, peut constituer un élément qui permet à l'électeur de former son jugement.

Car, même si cela déplaît aux puissants, la richesse plus ou moins grande, en elle-même, est un élément de jugement: à l'heure des sacrifices exigés, on peut ne pas avoir envie de voter pour un "riche" dont on ne voit pas bien les mérites exceptionnels et préférer voter pour quelqu'un qui ressemble plus au citoyen lambda. Certains responsables, comme les deux ministres écologistes, semblent d'ailleurs bien l'avoir compris: le patrimoine modeste rassure.

Didier Specq

Les commentaires sont fermés.