12/01/2015

L'affaire SK1: si loin déjà et si proche...

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Le terrorisme, les fichiers, la traque. Mais en 1994...

Nous sommes en janvier 1991 et Guy Georges, 29 ans à l'époque, agresse un soir à Paris une jeune femme, Pascale Escarfail, 19 ans. Il l'agresse en la suivant jusque chez elle, l'attache, la viole, la torture, la tue. C'est ainsi que le film l'affaire SK1 (serial killer numéro) démarre: le dossier arrive sur le bureau d'un jeune inspecteur qui vient d'être nommé à la brigade criminelle de la police judiciaire de Paris, au 36 quai des Orfèvres. Toute une époque! Il n'y a pas encore de téléphone portable et le moindre appel téléphonique nécessite la proximité d'un poste fixe.

Mais, justement, cette affaire à la fois si lointaine et si proche rencontre sans arrêt notre époque bien actuelle. Premier clin d'oeil à l'actualité, l'inspecteur, dont le nom patronymique est Magne, est surnommé par ses collègues "Charlie", comme Charlie Magne, empereur couronné en l'an 800.

On voit aussi les inspecteurs se précipiter, vers la station de métro Saint-Michel, où, durant la longue traque, un attentat se réclamant de l'islamisme radical vient de survenir.

Le film nous interroge aussi sur cette époque si naïve où la loi interdisait de rapprocher les tests ADN qui en étaient encore à leurs balbutiements. D'ailleurs, Charlie, qui s'acharne à traquer "son" assassin, refait des tests car, au fil des mois, les tests ADN s'améliorent et permettent de prendre en compte les prélèvements de plus en plus microscopiques. Cependant, impossible de confronter les tests ADN des suspects et des personnes condamnées: à cette époque, la Ligue des Droits de l'Homme et la gauche ont réussi à imposer une loi interdisant toute comparaison entre les tests ADN!

Résultats des courses: Guy Georges, bien que déjà lourdement condamné pour des agressions contre des femmes, bien que à nouveau interpellé pour une agression ratée, bien que ne regagnant pas la prison après une permission de sortie, bien que reconnu vaguement et interpellé encore, va passer plusieurs fois entre les mailles du filet. Il ressort de garde à vue tandis que les agressions du "tueur de l'est parisien" s'accumulent.

En 1994, c'est une responsable gonflée de la police judiciaire, passant outre à la loi, qui va imposer quelques comparaisons en exigeant des laboratoires un document par écrit au cas où ils invoqueraient la loi. Devant le chantage au scandale, les laboratoires ne s'abritent pas derrière la loi. Et les policiers vont enfin obtenir une comparaison qui va permettre l'arrestation du tueur récurrent...

Le 26 mars 1998, Guy Georges est enfin arrêté. Il agressait des femmes depuis 1981. En 2000, à son procès, Guy Georges reconnaîtra lui-même sept viols suivis du meurtre de sa victime et une agression "ratée" car la jeune femme attachée avait réussi tout de même à s'échapper. Total macabre auquel s'ajoutent les agressions antérieures pour lesquelles il avait déjà été condamné.

Devant le scandale, le Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques (FNAEG) est enfin créé malgré quelques réticences de ceux qui craignent encore pour les "libertés". Le film, très beau, très bien interprété, fait froid dans le dos. On n'arrive plus aujourd'hui à comprendre l'aveuglement des élus de la nation de l'époque.

Des centaines de milliers de dossiers, depuis, ont reçu pour leur conclusion le coup de pouce décisif des tests ADN systématiques. Des centaines de suspects accusés à tort, ont pu aussi prouver leur innocence parce que, malgré les charges qui pesaient sur eux, ce n'était pas leur ADN qui se trouvait sur les lieux du crime ou du délit. Le film est passionnant et on notera la prestation émouvante de Nathalie Baye dans le rôle toute en nuance de l'avocate.

Didier Specq

Commentaires

"quelques réticences de ceux qui craignent encore pour les "libertés""....
Oserais-je faire un rapprochement avec la situation actuelle et les indispensables mesures légales à prendre ?...Les Français accepteront-ils d'être plus surveillés et plus contrôlés, de voir leurs libertés entamées pour les protéger et préserver leur liberté ? La vieille dialectique entre liberté et sécurité, ...hein ? Le Specq, dis, hein ? me rappelle la loi Sécurité et Liberté de Peyrefitte sous Giscard, tiens, La suite au prochain numéro, c'est vrai c'est un bon film, avec Michel Vuillermoz qui me fait penser à un vieux journaliste des années 60 et on voit quelques vieilles bagnoles des années 80,

Écrit par : Marc Prévost | 14/01/2015

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